25.05.2010
Montée de l'insécurité. Et si on s'attaquait maintenant vraiment à ce que l'on appelle la ségrégation spatiale.
Ségration spatiale, vous ne savez pas bien ce que ce terme veut dire ? On va vous expliquer !
Pas besoin d'aller bien loin pour décortiquer ce phénomème, il suffit de regarder Neuilly-sur-Seine et encore plus près de nous, La Garenne-Colombes. On va vous expliquer comment une certaine politique conduit à la constitution de ghetto ailleurs ...
A La Garenne-Colombes, par exemple, il y a moins de 10 % de logements sociaux. On peut trouver cela bien. La tribu est cassée, la solidarité défaite, la pauvreté rejetée et ça pête un peu plus loin .
Lire ci-dessous en cliquant sur lire la suite l'article qui suit à propos de Neuilly. L'adaptation à La Garenne suivra ...
Neuilly-le-Ghetto, Gated Community à la française ou véritable volonté de ségrégation urbaine ? ....
Neuilly-le-Ghetto, Gated Community à la française ou véritable volonté de ségrégation urbaine ?
Les récents atermoiements électoraux ont braqué les projecteurs sur la discrète Neuilly-sur-Seine, fief de Nicolas, et maintenant Jean, Sarkozy. Ghetto de riches, cocon doré des Nappys (Neuilly, Auteuil, Pereire, Passy), les qualificatifs sont nombreux mais leur signification obscure ne permet pas de rendre compte efficacement des logiques ségrégatives qui animent cet espace urbain. C’est donc au terme d’une plongée dans la haute bourgeoisie neuilléenne qu’on essaiera de déterminer les modalités de cet apartheid social. Coincée entre la Défense et le 16e arrondissement, Neuilly ne ressemble à aucune autre commune de la couronne parisienne. Méritant le nom de banlieue de par sa position géographique, il est toutefois vain d’y chercher barres d’immeubles ou tronçons d’autoroute, Neuilly en effet cultive et revendique sa différence, que ses habitants érigent en un sacro-saint principe d’identité, quitte à devoir faire figure de camp retranché sur lui-même. On a donc bien affaire à une forte ségrégation spatiale, reste à préciser sur quelles logiques se fonde-t-elle et quelles sont ses conséquences sur le territoire qu’elle délimite et pour le reste de la communauté urbaine.
Remarque liminaire : le présent article s’appuie à la fois sur un corpus de textes [6] et sur l’expérience, [7] personnelle et professionnelle, que j’ai pu avoir de Neuilly à travers la fréquentation plus ou moins volontaire de certains de ses habitant(e)s.
L’expérience de Neuilly
Il est donné à quiconque ayant déjà arpenté les rues de Neuilly de constater les charmes discrets de la haute bourgeoisie : il est indéniable que Neuilly est un lieu où il fait bon vivre. Parmi les composantes de ce cadre de vie privilégié se trouve en bonne place le foisonnement d’infrastructures à destination de la population. En effet, le territoire de la commune de Neuilly bénéficie d’espaces verts à profusion, d’un dense réseau d’hôpitaux et de cliniques de qualité, de structures éducatives et culturelles exceptionnelles. Neuilly, malgré ses 60 000 habitants, n’a rien à envier aux plus beaux arrondissements parisiens ou même à d’autres villes de province, pourtant plus peuplées.
Ce cadre de vie presque idyllique est soutenu par la richesse de la commune, richesse privée ou publique, mais en tout cas assumée et étalée aux regards de tous. Sur le plan de la commune, la richesse publique provient à la fois des différents groupes économiques implantés, qui fournissent par l’impôt un apport financier considérable, mais aussi de la richesse privée des habitants (Neuilly est la commune qui comporte le plus de "victimes" (sic) de l’ISF) qui rejaillit naturellement sur la municipalité par le biais des impôts fonciers. Neuilly, commune la plus riche de France, abrite les plus riches des Français, la boucle est bouclée.
Confort de vie, infrastructures locales comblant tous les besoins, municipalité riche pouvant subvenir à toutes les dépenses, tous ces éléments concourent au sentiment d’autarcie éprouvé par nombre de Neuilléens, et là commence l’implacable logique de repli sur soi-même. En effet, quand on a tout à portée de main, qu’on subvient à ses propres dépenses, la tentation, quoique égoïste, est forte de se retrancher de la communauté, et de s’ériger en territoire indépendant, ou tout du moins de fermer à autrui le coin de paradis qu’on pense avoir bâti de ses mains, en oubliant rapidement et sans remords que c’est une politique nationale qui a permis à cette ville de voir le jour. De plus, l’autonomie financière est une chose importante, certes, mais, même importante, elle est loin d’être suffisante : à quoi ressemblerait Neuilly sans les milliers de petites mains qui chaque jour entretiennent ce havre de luxe, sans jamais cueillir les fruits de ce labeur. Vivre et travailler à Neuilly sont deux choses bien différentes et, depuis l’entrée de service, le cocon bourgeois ressemble plutôt à un enfer. Ce déni de reconnaissance est tel qu’à part les bonnes et les concierges, il est inconcevable à un Neuilléen de partager son "espace vital" avec quelqu’un d’extérieur à son milieu, quand bien même le travail de cet "intrus" est vital à la communauté.
Alors se développe une mentalité que l’on peut appeler de citadelle assiégée, c’est-à-dire un développement vicieux du sentiment d’autarcie. Au lieu de vouloir propager ailleurs le cadre de vie dont on a la chance de jouir, l’impératif devient de le défendre contre les assauts d’un extérieur qu’on redoute, et qui devient l’objet d’une méfiance maladive. En effet, le repli sur soi-même est bien palpable à Neuilly, où les habitants se regroupent au sein de clubs et de cercles de sociabilité huppés, dont le seul but est d’identifier par la suite les membres de sa caste, et ainsi d’éviter tout risque de mésalliance avec des populations d’un milieu jugé inférieur. Ainsi cette double thématique d’identification de ses pairs et de déni de reconnaissance à autrui sous-tend une construction identitaire en opposition à autrui, se définissant par une différence entretenue, artificielle plus que réelle, avec l’extérieur. De fil en aiguille, et au fur et à mesure des générations, ce sentiment de différence a amené la perception de l’extérieur comme un danger. Autrui est l’étrange, l’étranger au milieu, et il devient la menace, le danger, qu’on stigmatise et qu’on rend responsable de tout, et à défaut de le détruire, il s’agit alors de s’en écarter. Cette mentalité est on ne peut mieux observable chez les nouvelles générations, les fils de..., les héritiers des anciens bâtisseurs. Cette position d’héritier, une fois passé outre le clinquant et le luxe, est peu enviable car elle entraîne une faillite identitaire. En effet, alors que parents et grands-parents se sont construits eux-mêmes (plus ou moins) par leur travail et certaines valeurs, leurs héritiers ont tout, sans effort, et cette jeunesse dorée ne peut construire son identité autour des valeurs de leurs aïeux, déjà admises à la naissance. Si acquérir une position sociale au sein de la communauté, par sa valeur ou sa participation au bien-être commun, permet de se construire, que peuvent faire ceux qui naissent une cuillère d’or dans la bouche et intimement persuadés de faire partie de l’élite, par leur simple naissance. Rien à construire, rien à défendre, les seules choses en commun qui restent à ces fins de lignées sont donc l’argent et cette différence avec les Autres, qui fera donc office de principe d’identité et qu’on aura soin de maintenir. Cette jeunesse dorée se définit en particulier par son mode de vie en vase clos, autour de divers temps et lieux de sociabilisation : les rallyes mondains, les clubs ou bars branchés du marais, les réunions politiques. En ce cas comme en d’autres, les règles de vie sont dictées par l’apparence, primordiale, ces héritiers n’ayant d’identité et de valeur qu’à travers le groupe, véritable entité organique en charge de leurs vies. La seule valeur reconnue par ce monde clos étant l’argent, la construction identitaire tourne vite à la course à la dépense, le statut social dépend des signes extérieurs de richesse qu’on peut arborer. Bien évidemment, même si tous ces jeunes gens se réclament du libéralisme et ne se lassent pas de fustiger les "profiteurs" et les "assistés", cette richesse n’est pas la leur, mais celle de leurs parents, fruit du travail de leurs ouvriers, et bien au contraire, la vie active et le travail, surtout manuel, sont méprisés, réservés au peuple. Parmi ces étudiants, être boursier est aussi honteux qu’avoir un petit boulot, mais on est loin d’une notion d’otium antique axée sur une activité intellectuelle, jugée trop peu hype, il s’agit ici de "flamber", beaucoup, en groupe. Bien évidemment, ce style de vie s’accompagne d’une véritable paranoïa à l’égard des autres groupes sociaux, jugés jaloux et envieux, donc voleurs et dangereux. Classes laborieuses, classes dangereuses. Jamais il ne pourrait venir à l’esprit d’un Nappy qu’il ne puisse être considéré comme le phare de la cité, rayonnant et lumineux. On comprend alors la nécessité de se renfermer sur un monde peuplé de ses propres clones, plutôt que de risquer d’affronter l’extérieur et son indifférence ou, pire, son mépris et son dégoût.
Mais le château Disney qu’est Neuilly n’est pas seulement le refuge rose bonbon du strass clinquant et vulgaire [8], c’est aussi un véritable château médiéval, centre de pouvoir dominant les territoires adjacents. En effet la jeunesse neuilléenne formera l’élite de demain, économique, « culturelle » et politique, et il n’est d’ailleurs pas besoin d’attendre demain, puisque la plupart des responsables politiques, tous partis confondus, vivent dans cette commune, voisins complaisants des grands responsables économiques, privés ou publics, et des nouvelles images de la culture française, tels Arthur, Johnny Halliday ou Bigard. C’est donc d’un véritable pouvoir décisionnel qu’est investie Neuilly, à tous les niveaux, ce qui lui donne les moyens de mettre en oeuvre les visées ségrégatives qui l’animent et la définissent.
Les voies de la ségrégation
Neuilly et ses puissants habitants ont donc à la fois la volonté et le pouvoir d’appliquer des politiques ségrégatives qui sont pour eux à la fois moyen de sauvegarder leur espace et de se construire une identité de groupe depuis la faillite des valeurs ancestrales, remplacées par l’argent comme seul critère d’appartenance à l’élite.
Cette ségrégation urbaine est directement observable dans l’urbanisme de la commune. Isolée de ses voisins de Puteaux, trop populaires, par la Seine, Neuilly développe donc une relation sélective avec les espaces qui l’entourent, préférant minimiser ses relations avec Puteaux tout en faisant preuve de grands efforts pour se rapprocher du 16e arrondissement. En effet, jusqu’à très récemment, la frontière entre Puteaux et Neuilly était la friche industrielle de l’île de la Jatte, alors qu’à l’Est, le bois de Boulogne n’est pas une séparation avec le 16e, mais au contraire une synapse, un espace d’échange construit autour des clubs privés du parc, comme si la population de parvenus de Neuilly voulait s’approprier l’héritage culturel et historique de la vieille noblesse, traditionnel combat de la bourgeoisie. Il est aussi à noter que la commune de Neuilly a bataillé ferme lors de la construction du Boulevard Périphérique pour que celui-ci soit enterré à la jonction entre Neuilly et le 16e arrondissement, faveur qui ne fut pas accordée ailleurs, pourquoi en effet priver les HLM de la vue sur le périph’ ? Ainsi il apparaît que Neuilly n’est pas un territoire fermé, hermétique, mais bien que la commune sélectionne ses relations avec l’extérieur, n’acceptant de communication qu’avec les espaces qu’elle juge en accord avec ses valeurs, comprendre les territoires riches ou influents. Ainsi l’exemple de la ligne de métro 1, véritable symbole de la triade autour de laquelle gravite Neuilly : la Défense, pôle économique, le 16e, pôle culturel d’une élite passée de mode et, enfin, le quartier de l’Elysée, pôle politique par excellence. Cette ligne 1, jamais ou, tout du moins, rarement en grève, peut être comprise comme le symbole du plan d’intégration de Neuilly dans l’espace urbain, véritable squelette de son réseau d’influence, où la volonté de se mettre à l’écart de territoires moins riches et puissants laisse une nouvelle trace dans l’urbanisme. Toutefois, il serait faux de donner à Neuilly le statut d’une Gated Community, ce qui la limiterait à être le dortoir inactif de l’élite, chose que les témoignages de son influence récusent. De plus, point de miradors et de clôtures électrifiées, les systèmes de défense de Neuilly sont moins flagrants et plus subtils.
En effet, Neuilly n’a pas besoin de barbelés pour décourager les intrus, l’atmosphère même de la ville se charge de préserver la tranquillité de la caste neuilléenne. La commune est souvent comparée par ses habitants à un village, et c’est ainsi que l’intrus le perçoit. On a parlé plus haut des cercles d’identification et de reconnaissance des membres de cette communauté, ils prennent tout leur sens ici en sous-tendant une atmosphère d’exclusion matérialisée par le regard. Ainsi, même habillé du réglementaire costume trois pièces, qui suffit à de nombreux endroits pour être identifié à l’élite, il est impossible d’infiltrer les rues de Neuilly avec un visage qui n’a pas été auparavant vu pendant de longues années dans les clubs, paroisses, meetings politiques où la jeunesse neuilléenne se découvre et assimile les nouveaux arrivants, et où le fait d’habiter à Neuilly est nécessaire, validation implicite du critère financier de reconnaissance. Les conséquences sont alors désagréables : regards méfiants à la dérobée, vieilles dames serrant leur sac contre elles sur votre passage, habitants suspicieux à votre entrée dans une porte cochère... tout une dialectique du regard qui envoie un message simple et clair à l’intrus : vous n’êtes pas le bienvenu. Toutefois, si ce blocus mental peut à juste titre rebuter les visiteurs occasionnels, il n’est pas suffisant pour se débarrasser de ces encombrantes petites mains qui travaillent à Neuilly chaque jour et souffrent de ne pouvoir y loger.
C’est là l’occasion pour Neuilly de mettre en branle l’influence qui est sienne pour défendre son territoire. Cela se traduit notamment par la croisade de la commune contre l’implantation (pourtant obligatoire) de 20 % de HLM [9]. De plus, les rares habitations classées HLM que comporte la commune sont à des lieues de l’image de la "barre" populaire, elles ne diffèrent en rien des autres constructions, mis à part le fait qu’elles sont habitées par les proches du pouvoir municipal, qui bénéficient ainsi de loyers plus que modérés. Ces ruses ne sont possibles que grâce à la complicité de la majorité de l’élite politique et économique en place, qui fait front avec la municipalité de Neuilly pour défendre ce havre de luxe qui est aussi le leur. On comprend donc mieux la faiblesse de l’implantation des organisations d’extrême droite, puisque la thématique principale de défense identitaire ne peut séduire les Neuilléens : ils assurent eux-mêmes la sauvegarde de leur confort et de leur identité locale, en organisant, depuis les arcanes du pouvoir, la ségrégation et l’inégalité. C’est une véritable solidarité de caste qui se met en place autour de Neuilly, assurant ainsi à l’élite à la fois un havre de paix et la garantie de sa propre reproduction, mettant en péril la diversité sociale.
Conséquences de la ségrégation
En effet, les conséquences de la ségrégation sont variées et dépassent le simple cadre local, étant donné la place de pôle dominant de Neuilly. En premier lieu, une telle ségrégation entraîne une sclérose du tissu social, du fait même de la ségrégation, mais aussi de l’endogamie et de cette forte identité, à laquelle doit se plier tout nouvel arrivant sous peine d’être exclu de la vie communautaire. On assiste alors à un véritable formatage qui assure la non-évolution sociétale de Neuilly, année après année. Cette mort de la diversité est regrettable, mais n’est pas un argument à tenir face à un Neuilléen, puisque que c’est justement l’homogénéité sociale qui était le but de cette entreprise d’apartheid. Toutefois, cette sclérose s’étend à tout le pays, puisque si l’élite et Neuilly se confondent ou, tout du moins, partagent des valeurs et des buts, alors les mécanismes du très républicain ascenseur social sont grippés, et il devient impossible d’avoir un rôle déterminant dans la communauté politique sans avoir prouvé auparavant son engagement pour les valeurs nouvelles incarnées par les parvenus de Neuilly, que ce soit par naissance ou par ralliement ultérieur. Cette sclérose de l’appareil politique a atteint son paroxysme lors de la campagne municipale 2008, où David Martinon, pourtant introduit par Nicolas Sarkozy lui-même a été évincé par Arnaud Teullé dans le coeur des Neuilléens. La raison ? Bien loin d’une différence idéologique, les programmes des deux hommes étant sensiblement les mêmes, ce qu’on a reproché à David Martinon était qu’il n’était pas né à Neuilly... Il y a donc bien eu ici ségrégation urbaine, entre deux hommes du même milieu politique et social, cela laisse imaginer ce à quoi peut s’attendre un étranger total.
De là, découle le problème de la remise en question de toute la thématique de l’égalité des chances et du mérite, dont les louanges sont pourtant chantées par l’actuel habitant de l’Elysée. En effet, il est indéniable qu’un jeune actif ou un jeune diplômé habitant Neuilly ou plus globalement appartenant à la caste des parvenus se verra confier plus facilement de hautes responsabilités, privées ou publiques, au regard de son intégration, dès la naissance, dans le monde du pouvoir ; la solidarité de caste prévalant sur les véritables capacités de chacun. De plus, cette faillite de l’égalité des chances ne se limite pas aux personnes, puisque la concentration d’influences politiques et économiques dans une petite commune implique nécessairement tout un ensemble de faveurs de la part du pouvoir en place. Ainsi, l’enfouissement de l’avenue Charles-de-Gaulle, qui coupe Neuilly en deux, un chantier représentant un budget trois fois supérieur à celui du viaduc de Millau est devenu récemment prioritaire dans les projets d’urbanisme de l’Etat, depuis l’élection de Nicolas Sarkozy... Il est à noter que la commune de Neuilly refuse d’assumer le coût d’un tel chantier, préférant faire appel à l’Etat et donc à une solidarité nationale forcée, solidarité qui a du mal à trouver sa place dans l’autre sens [10].
Ainsi, cette rapide analyse du phénomène urbain et social qu’est Neuilly a fait apparaître un ensemble d’observations et a permis de répondre à certaines questions. Neuilly ne mérite donc pas le nom de ghetto, puisque ouverte sur de nombreux espaces, dûment sélectionnés, et encore moins celui de Gated Community, puisque la ségrégation qu’on y observe n’est pas le fait d’initiatives privées, mais bien le résultat de dynamiques spatiales impulsées par l’Etat lui-même. La commune de Neuilly est la preuve discrète du double discours entretenu par le pouvoir étatique, qui sous des dehors paternalistes prône le mérite et l’égalité des chances, mais prend bien soin de ménager à l’élite dont il est issu un territoire protégé d’où il peut assurer les bases toujours renouvelées de sa domination sur le peuple, entre gens du même monde. Compte tenu de cette implication de l’Etat, il faudrait employer le terme d’apartheid social.
De plus, la composition de cette élite neuilléenne fait apparaître des changements, une rupture, clairement personnifiés par Nicolas Sarkozy : c’est la fin d’une élite qui pouvait encore passer pour un reliquat de la noblesse, et qui à ce titre partageait certaines valeurs de travail, d’effort, et de discrétion feutrée. On a vu plus haut la faillite de ces valeurs, remplacées par l’argent-roi, d’autant plus qu’il est vite gagné et sans effort. Ces dinosaures altiers ont été remplacés par une génération de parvenus, les capitaines d’industrie par les boursicoteurs, le charme discret, tout en retenue, de la haute bourgeoisie par le clinquant vulgaire des nouveaux riches. Le self-made-man et le chevalier ne font plus rêver, place à l’héritier, mort à Malraux, vive Paris Hilton !
[6] Les Ghettos du Gotha, Michel Pinçon, éd. du Seuil, 2007
Revue Esprit de novembre 2007, "Neuilly, un territoire de branchement."
19:34 Publié dans Lecture transversale | Lien permanent | Commentaires (0) | Envoyer cette note
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